Des hommes foulent le sol de la Normandie depuis au moins 400 000 ans. Durant ce temps très long, la topographie des lieux a beaucoup varié en fonction des changements climatiques et de l’érection des plateaux alentours. Nos ancêtres ont d’abord dû subir les modifications de cet environnement, avant de se mettre à l’exploiter. Il s’ensuit l’existence de deux grandes phases. Au cours du Quaternaire, l’alternance de périodes chaudes et froides a conditionné l’établissement ou au contraire la désertion des populations ; jusqu’à – 5 000, elles ont vécu en pratiquant prédation et nomadisme. À partir de cette date, avec l’arrivée des premiers paysans néolithiques, la vallée de la Seine et les côtes de la Manche constituent des axes de circulation privilégiés, comme le montre la répartition d’objets importés, parfois de contrées lointaines. C’est encore plus vrai aux Âge du Bronze et du Fer, où la Manche, entre continent et îles britanniques, devient une sorte de petite Méditerranée ; camps et sites fortifiés de hauteur permettent alors le stockage de marchandises destinées à l’exportation et le développement d’activités artisanales, tout en témoignant de l’émergence de petites principautés ou de clans qui cherchent à contrôler cette nouvelle économie.
Jean-Pierre Watté, docteur en Préhistoire de l’Université de Paris 1-Panthéon-Sorbonne, est archéologue honoraire du Muséum du Havre. Rattaché à l’UMR 6566 de l’Université de Rennes, il est aussi, entre autres, vice-président de la Commission Départementale des Antiquités de Seine-Maritime, secrétaire du Centre de Recherches Archéologiques de Haute-Normandie et administrateur de l’APVSM.